Camille (1910-2009) &
Walter Bondy (1880-1940)
Né à Prague dans une famille juive non pratiquante, ce peintre dessinateur et photographe fait partie des premiers intellectuels étrangers installés à Sanary, où il rencontre, en 1932, Camille Bertron de 30 ans sa cadette. Unis par un amour fou et leur vocation artistique commune, ils se marient en 1937 et ouvrent un studio de photographie, d’abord, à Sanary puis à Toulon.
L’évolution politique réduit leur activité de manière significative et en 1939, Walter est menacé d’internement dans un camp. Si son diabète lui donne le statut d’étranger non transférable, sa maladie et l’occupation allemande de Paris ont raison de sa force de vivre. Il meurt le 17 septembre 1940. Camille continue son œuvre. Elle meurt en 2009 à Toulon.
À la montée du nazisme en Allemagne, Walter Bondy quitte Berlin à l’automne 1932 dans sa Ford américaine avec deux valises et sa petite chienne Geisha. Il séjourne d’abord à Ascona, mais décide, en raison du coût de la vie en Suisse, de se rendre à Ibiza ou Majorque. Sur sa route il s’arrête chez son vieil ami de l’époque du Café du Dôme à Montparnasse, l’historien d’art Julius Meier-Graefe, à Saint Cyr.
Celui-ci lui suggère de s’installer dans le charmant village de Sanary que Bondy connait bien pour y avoir séjourné à plusieurs reprises. Il y loue la villa La Côte qui, par la suite, est habitée par Ludwig Marcuse lorsque Walter Bondy s’installe sur le port. Ici, il rejoint souvent ses amis Erich Klossowski et Julius Meier-Graefe sur la terrasse du Café de Lyon pour des parties d’échec et pour parler politique.
C’est dans ce lieu qu’il fait la connaissance de Camille Bertron de Nîmes, dont la famille vient régulièrement passer l’été à Sanary. Madame Bertron invite Walter chez elle pour qu’il lui donne son avis sur les peintures réalisées par sa fille Camille. C’est ainsi que le futur couple fait plus ample connaissance et finit par tomber amoureux. C’est pour Walter que Camille, majeure, quitte sa famille et c’est pour Camille que Walter reste à Sanary et ouvre un studio de photographie sur le quai Marie Esmenard afin d’assurer leur quotidien. A l’origine peintre portraitiste, Walter Bondy devient photographe portraitiste. Il emploie sa propre technique pour illuminer le visage de son modèle, une méthode qui éveille la curiosité de Louis Lumière installé à Bandol. Quand Walter photographie les exilés, il les met en valeur. Mais il ne photographie pas uniquement les artistes exilés ; sous son objectif quelques familles sanaryennes, dont les enfants de la famille Cavet, se font tirer le portrait.
A partir de 1936/1937 l’opinion publique à Sanary change. On soupçonne tous les germanophones d’être des espions. Face à ce climat de méfiance, Walter et Camille préfèrent déménager à Toulon, avenue Colbert. Leur clientèle se compose maintenant des personnalités de la ville. Mais en 1938 on retire à Walter son permis de travail et en 1939 après l’éclatement de la Seconde guerre mondiale il est menacé d’être envoyé dans un camp d’internement. Walter gravement diabétique, dépendant de ses injections d’insuline et l’envoi au camp lui serait fatal. Camille va alors solliciter le commandant de Toulon, dont Walter a fait le portrait peu de temps auparavant, pour qu’il lui accorde le statut « d’étranger non transportable ». Mais Walter n’a plus la force de vivre et lorsqu’il apprend l’invasion des nazis à Paris, il arrête ses injections d’insuline et décède le 17 septembre 1940.
Après la disparition de son époux, Camille continue de pratiquer la peinture et la photographie. Elle parvient à conserver les œuvres de Walter et c’est la ville de Toulon, où elle vécut jusqu’à son décès, en 2009, qui acquit une partie de sa collection. Auprès de la bibliothèque municipale, elle effectue, de son vivant, un important travail d’identification des portraits d’artistes réalisés du vivant de Walter Bondy.
Pour aller plus loin …
La Médiathèque Jacques Duhamel de Sanary-sur-Mer propose un fonds regroupant des ouvrages sur le thème Mémoire d’exil à Sanary